« La musique n’a pas
de compartiment »
Par Jean-François Picaut
Les Trois Coups.com
Stefano Di Battista et Sylvain Luc viennent de signer un album commun. « Les Trois Coups » ont voulu savoir comment s’était produite cette rencontre inédite de deux musiciens connus et reconnus dans leur spécialité.
Les Trois Coups. — Comment, Stefano Di Battista et Sylvain Luc, en êtes-vous arrivés à faire un disque sous votre double signature ?
Stefano Di Battista. — Sylvain m’a appelé pour partager avec lui un nouveau projet. Giù la testa est le résultat d’une envie de jouer ensemble que nous avions depuis longtemps.
Sylvain Luc. — Stefano n’avait pas fait d’album avec un guitariste, et je n’en avais pas fait avec un saxophoniste, c’était une occasion rêvée.
Les Trois Coups. — Vous êtes épaulés par une rythmique bien présente et efficace, comment en avez-vous choisi les membres ?
Sylvain Luc. — Stefano a proposé un bassiste, Daniele Sorrentino, avec qui il joue régulièrement. Et j’ai proposé un batteur-violoncelliste, Titi (Pierre-François) Dufour, que des amis m’avaient recommandé. C’était un défi, car il faut parfois du temps pour qu’une rythmique qui ne se connaît pas parvienne à jouer ensemble. Et ça a fonctionné !
Les Trois Coups. — Très bien, même. Tous les deux, dans cet album, vous exploitez très largement la palette de chacun de vos instruments. Comment avez-vous géré la répartition des rôles entre vous et le mariage des couleurs musicales ?
Stefano Di Battista. — Ça a été assez facile, vu que la musique elle-même nous amène dans des lieux différents, qui nous ont donné, naturellement, la direction des notes.
Sylvain Luc. — Oui, et en jouant, on s’est rendu compte que les unissons fonctionnaient à merveille.
Les Trois Coups. — Stefano, en 2013 à Jazz sous les pommiers et cette année encore lors de Jazz à Vienne, je vous ai entendus exprimer votre souhait de rendre justice aux compositeurs italiens, de les faire mieux connaître. Est-ce un des buts de votre nouvel album, Giù la testa, qui vient de paraître chez Just Looking Productions / Harmonia mundi ? Et si oui, n’y a-t-il pas un paradoxe à nommer ce disque « Baisse la tête », puisque c’est la traduction du premier titre de ce qui deviendra Il était une fois la révolution ?
Stefano Di Battista. — J’aime jouer la musique des compositeurs italiens. Pas forcément pour leur rendre justice ou pour les faire connaître, mais simplement par plaisir. Dans le cas de cet album, nous avons trouvé avec Sylvain que nous avions un « patrimoine » à proposer. Si le public peut imaginer autre chose que le film en écoutant la musique, alors ça nous fait plaisir.
Sylvain Luc | © Jean-François Picaut
Les Trois Coups. — Vous êtes coleaders d’un opus qui paraît très éclectique : deux de vos compositions, Luc, une de vous, Stefano, deux reprises d’Ennio Morricone et de Michel Legrand, une de Nino Rota qui forment un bloc de musiques de film, une de Ray Charles et une de William Walton. Y a-t-il néanmoins une unité dans votre dernière production à tous les deux ?
Stefano Di Battista. — L’unité réside dans le fait que nous avons essayé de suivre un chemin sonore que nous avons aimé, et qui nous a accompagnés jusqu’à aujourd’hui. Nous avons essayé d’en faire un parcours sincère, entre ce « patrimoine » et nos compositions, car nous pensons que la musique n’a pas de compartiment.
Les Trois Coups. — Stefano, vous dédiez une très belle ballade, Arrivederci, à votre mère et vous lui rendez un hommage émouvant et vibrant dans le livret. Quel a été son rôle dans votre vie de musicien ?
Stefano Di Battista. — Tutti !
Les Trois Coups. — Sylvain, la plupart des auditeurs sont frappés par l’originalité dans l’interprétation du célèbre I Got a Woman de Ray Charles, votre introduction n’y pas étrangère. Comment vous en est venue l’idée ?
Sylvain Luc. — J’avais envie de le jouer avec un son un peu saturé. Je suis dans une période de recherches de sons, et je souhaitais être en accord avec ces expérimentations sonores. Cette intro a été improvisée, et l’idée est venue assez naturellement.
Les Trois Coups. — Merci à vous deux de vous être prêtés à cet entretien. Un petit mot de conclusion peut-être ?
Stefano Di Battista et Sylvain Luc. — Merci à vous pour cette interview. ¶
Propos recueillis par
Jean-François Picaut
Giù la testa, de Stefano Di Battista et Sylvain Luc
Un album Just Looking Productions / Harmonia mundi (2014)
Avec Stefano Di Battista (saxophone), Sylvain Luc (guitare), Daniele Sorrentino (basse et contrebasse) et Titi (Pierre-François) Dufour (batterie et violoncelle)
Stefano Di Battista et Sylvain Luc seront en concert :
– le 23 octobre 2014 au Café de la danse • 5, passage Louis-Philippe • Paris XIe, pour fêter la sortie de leur album
– le 25 novembre 2014 à Monaco, pour le Monte-Carlo jazz Festival
Photos : © Jean-François Picaut